Depuis plus de mille ans, le Royaume du Maroc est lié à un certain nombre de pays d’Afrique de l’Ouest par des liens dont les soubassements au niveau religieux sont le partage du dogme, du rite et des chaînes d’autorités sur lesquelles repose la Tradition du Prophète. A partir du dix-neuvième siècle, ces liens se sont renforcés avec la diffusion de la voie soufie Tijaniya dans ces pays.

Parmi les fruits de ce partage religieux et culturel se trouve le statut spirituel dont bénéficie, auprès des habitants de ces pays, la Grande Imamat, la Commanderie des Croyants, chose qui n’entre pas en contradiction avec la différence des systèmes politiques et des conjonctures historiques.

Ces liens ont résisté aux changements historiques sous la colonisation et aux nouveaux courants intellectuels après les indépendances.

Au cours des quatre dernières décennies, les constantes religieuses communes aux pays africains ont été soumises à des perturbations extérieures. Les Africains, surtout les Ouléma qui assistaient aux causeries religieuses hassaniennes au Maroc pendant le mois de Ramadan depuis les années 60 du siècle écoulé, se rendirent alors compte que la coopération avec le Royaume du Maroc pour faire face à ce parasitage, de l’identité du dogme et du rite, et pour éclairer les gens sur les questions de religion avait besoin de renforcer les liens que les voies soufies avaient préservés. Et il était clair que ce renforcement ne pouvait se faire que par une activité commune sous l’égide des Ouléma. Un début de réalisation se fit avec la création de la Fondation des Ouléma du Maroc et du Sénégal en 1985.

En 2015, le Commandeur des Croyants, Sa Majesté le Roi Mohammed VI décida, en vue de renforcer cette coopération à travers les Ouléma, de créer, sous sa présidence la « Fondation Mohammed VI des Ouléma Africains ». Le 14 juin 2016, il installa, à la Mosquée Al Qaraouiyine à Fès, les membres fondateurs, en présence de 100 Ouléma de trente pays africains.

Le Dahir chérifien portant création de la Fondation stipule que ses objectifs sont la préservation de ce que les membres ont en partage relativement au dogme, au rite et à la conduite spirituelle ; la diffusion de la loi théologique authentique ; la propagation de la pensée musulmane modérée ; la revivification du patrimoine culturel en partage ; le raffermissement des relations spirituelles.

La Fondation œuvre, depuis sa création, à ouvrir des branches dans les différents pays Africains ; elle a décidé, lors de ses dernières réunions, d’organiser des activités scientifiques dans le but de discuter de la façon de protéger la pratique religieuse en Afrique de l’extrémisme et de l’intégrisme et de faire des valeurs religieuses un soutien de cohésion nationale et de coexistence harmonieuse entre les choix religieux.

Les sessions de la Fondation ont également soulevé la question qui consiste à prendre connaissance du modèle marocain de gestion du champ religieux pour voir dans quelle mesure on peut en tirer profit tout en respectant les spécificités des pays, de leurs régimes et de leurs besoins.

La création de cette Fondation a reçu un accueil chaleureux de la part des Ouléma, des cheikhs des voies soufies et des penseurs musulmans en Afrique. La conviction générale est la certitude du bénéfice attendu du dialogue, de l’échange d’expertise et de l’invention de moyens à même de répondre positivement aux besoins religieux des gens, en mobilisant le crédit inhérent aux composants identitaires, le dévouement à Dieu dans l’accomplissement de toute action et la coopération avec tous ceux qui recherchent le Bien.